ASSOCIATION DOURGNE PATRIMOINE
(LA RECHERCHE, L'ETUDE, LA SAUVEGARDE ET LA PROMOTION DE NOTRE PATRIMOINE)
Extrait de la revue "Les cahiers de l'Histoire de REVEL", N° 17 de janvier 2012 par l' ASSOCIATION DOURGNE PATRIMOINE
La Montagnarié à DOURGNE
L’histoire de la pierre de St Eutrope en partie élucidée.
Grâce à la perspicacité et aux connaissances de notre ami Jean Paul CALVET, l’Association Dourgne Patrimoine a pu reconstituer le parcours hypothétique de cette pierre retrouvée, il y a quelques mois, à la Montagnarié. En voici les principaux éléments.
1- Une chapelle semble avoir existé à la Tuilerie (La Teulière) au 19ème siècle et même avant, puisque sur le cadastre daté de 1834(section C1) se trouvent à hauteur de cette ferme et de part et d’autre du chemin allant de La Montagnarié à St Amancet, deux toponymes lieux dits : La Chapelle à l’ouest et La Chapellenie, plus à l’est (Bénéfice d’un chapelain (prêtre desservant une chapelle)).
Emplacement présumé de la chapelle
2- A cet endroit, figurait jusqu’à récemment une croix perpétuant le souvenir de cette chapelle. L’emplacement de cette croix existe toujours. La croix a été récupérée par l’ADP auprès des employés municipaux. Cette croix n’est pas ancienne, mais, au fil des ans elle a pu être restaurée ou tout simplement remplacée par la population locale.
3- En 1857, ou avant car la chapelle ne figure pas sur le cadastre de 1834, les pierres de cette chapelle ont pu être déblayées du lieu et réutilisées par les habitants. Le bénitier de la chapelle (très ancien d’après JP Calvet) pourrait avoir été sauvé et transporté vers la source de Moniès. Cette source, d’après Pierre Borel (~1620-1671 médecin, botaniste et érudit français né à CASTRES), et des études menées par Sylvie Campech, était autrefois appelée fontaine de St Eutrope. Ce saint ayant aussi la particularité de soigner divers maux, tels ceux liés au yeux ou encore des blessures aux membres (1). C’est ainsi que l’on peut expliquer la reconversion du vieux bénitier en « Fontaine de St Eutrope, consacrée le 30 avril 1857 », inscription se trouvant sur un côté de la pierre, sous la vasque, gravée sur un ciment plus récent. Des évacuations d’eau, bien visibles, ont été sculptées sur deux côtés de la pierre.
Couche visible de ciment rapporté, avec inscription
4- Comment cette fontaine (visible actuellement à l’office du tourisme de la Montagne Noire), a-t-elle pu se retrouver sur l’ancien chemin de Dourgne au Baylou ? Peut-être a-t-elle été, encore une fois, récupérée par un agriculteur local puisqu’elle servait de réceptacle à une source avant d’être sauvée par l’association dourgnole, et ce, grâce à la bienveillance de son découvreur.
Avec ces explications, l’histoire de cette fontaine racontée ici s’approche de la vérité. Tous les témoignages seront les bienvenus pour les confirmer ou les infirmer. (2)
(1) Le mot français « estropié » trouve son origine dans « Eutrope », raison pour laquelle le saint est invoqué.
(2) Les supputations de Sylvie CAMPECH quant à l’emplacement de la chapelle dans le hameau de la Montagnarié sont erronées. La croix figurant sur la photographie reproduite page 62 dans « Les églises médiévales de la région de Dourgne et Sorèze (Tarn) », de Patrick MASSIP, ne représente pas l’emplacement du monument, d’autant plus que ce lieu ne se trouve pas au carrefour des chemins qu’elle cite.
Saint Eutrope fut le premier évêque de Saintes, vers le IIIe siècle de l'ère chrétienne.
On sait très peu de choses de lui ; même la date de son épiscopat est incertaine. Sa vie fut donc confiée à la tradition orale et l'imagination des conteurs en fit peu à peu une légende. Seuls deux Pères de l'Eglise en font mention : Venance Fortunat qui en parle indirectement (le texte parle de la basilique de saint Eutrope qui est en ruine) dans son recueil de poèmes Carmina (chap. XIII), et Grégoire de Tours (538-594), qui cite son nom dans une liste d'évêques arrivés en Gaule sous l'empereur Dèce (249-251), et surtout dans l'ouvrage In gloriam martyrum (chap. LVI), écrit vers 590, où Eutrope apparaît comme un martyr. Durant la période médiévale puis au XV-XVIe siècles, de nombreuses vies d'Eutrope vont être rédigées. Louis Audiat, savant saintongeais, les étudia au XIXe siècle. Plus encore qu'un personnage énigmatique, saint Eutrope devint un personnage légendaire dans les nombreuses vies qu'on écrivit sur lui et dans les poèmes qui lui sont dédiés. Citons par exemple Juillard du Jarry qui écrivit de lui en 1715 :
«Un fameux martyr, par des actes célèbres,
Des peuples abusés dissipa les ténèbres.
Eutrope, par Saint Pierre envoyé dans les lieux,
Vint lever le bandeau qui couvrait tous les yeux. »
St Eutrope, buste reliquaire du diocèse de Blois.